Quel est le traitement de l'uvéite syphilitique ?

L’uvéite syphilitique est une complication grave de la syphilis, une infection causée par la bactérie Treponema pallidum. Cette maladie sexuellement transmissible peut se manifester par de multiples atteintes systémiques, mais l’atteinte oculaire fait partie des formes les plus redoutées car elle menace directement la vision. Chez le patient, l’uvéite peut se présenter sous forme antérieure, postérieure ou toucher l’ensemble du globe oculaire, on parle alors de panuvéite. Le diagnostic et le traitement précoces sont essentiels pour limiter les séquelles irréversibles.

Pourquoi traiter toute uvéite syphilitique comme une neurosyphilis

Dès qu’une atteinte oculaire est identifiée dans la syphilis, les recommandations internationales considèrent que la situation équivaut à une neurosyphilis, même si l’analyse du liquide céphalorachidien paraît normale. En effet, l’œil est une extension du système nerveux central. Toute inflammation intraoculaire d’origine syphilitique doit donc bénéficier du protocole le plus complet afin d’assurer une stérilisation de l’infection.

Cela signifie que, quel que soit le type d’atteinte (uvéite antérieure, postérieure, ou panuvéite), le traitement doit être standardisé et puissant. Cette prise en charge concerne aussi bien les formes isolées que celles associées à d’autres manifestations systémiques de la maladie secondaire.

La pénicilline G intraveineuse : traitement de référence

Le cœur de la prise en charge repose sur la pénicilline G, antibiotique historique et toujours le plus efficace contre Treponema pallidum.

  • Posologie recommandée : 18 à 24 millions d’unités par jour, administrées en perfusion continue ou toutes les 4 heures.

  • Durée du traitement : de 10 à 14 jours.

Ce schéma permet d’obtenir des concentrations suffisantes dans le liquide céphalorachidien et dans les tissus oculaires. Chez le patient, une prise en charge rapide augmente considérablement les chances de récupération visuelle. À l’inverse, un retard expose à des séquelles définitives, notamment au niveau rétinien ou du nerf optique.

Alternatives en cas d’allergie à la pénicilline

Chez les patients ayant une allergie confirmée :

  • L’alternative validée est la ceftriaxone à raison de 2 g/jour IV ou IM pendant 10 à 14 jours.

  • Dans certaines situations particulières (grossesse, formes sévères), la désensibilisation à la pénicilline reste la stratégie de choix, car elle permet d’administrer le traitement de référence.

  • D’autres antibiotiques comme la doxycycline peuvent être utilisés en dernier recours, mais leur efficacité est inconstante dans les atteintes oculaires ou neurologiques.

La corticothérapie : un adjuvant indispensable mais jamais seul

L’instauration du traitement antibiotique peut déclencher une réaction inflammatoire brutale, appelée réaction de Jarisch–Herxheimer, pouvant aggraver transitoirement l’inflammation oculaire.

Pour contrôler cette réaction :

  • une corticothérapie générale (prednisone orale) est souvent introduite après 24 à 48 heures de début du traitement antibiotique,

  • des collyres ou injections locales peuvent compléter la prise en charge dans les formes antérieures,

  • ⚠️ les corticoïdes seuls ne doivent jamais être prescrits : ils masquent l’infection sans l’éliminer.

Suivi après traitement : sécuriser la guérison

La réussite thérapeutique ne se limite pas à la cure intraveineuse.

  • Suivi sérologique : contrôle du VDRL ou RPR à 3, 6, 12 et 24 mois. Une baisse d’au moins quatre fois du titre d’anticorps est le signe d’une réponse correcte.

  • Suivi ophtalmologique : indispensable pour vérifier la disparition de l’inflammation, dépister les complications comme le glaucome secondaire ou les cicatrices rétiniennes.

  • Cas particuliers : chez les patients vivant avec le VIH, le suivi doit être encore plus rapproché, car l’atteinte oculaire est souvent plus sévère et la réponse immunitaire moins efficace.

Points clés à retenir

  • Toute uvéite syphilitique doit être considérée comme une neurosyphilis.

  • Le traitement de première intention reste la pénicilline G intraveineuse pendant 10 à 14 jours.

  • La ceftriaxone 2 g/jour est l’alternative en cas d’allergie, mais la désensibilisation à la pénicilline doit être privilégiée dans les cas graves.

  • La corticothérapie est un adjuvant utile pour calmer l’inflammation, mais ne remplace jamais l’antibiotique.

  • Le patient doit bénéficier d’un suivi sérologique et ophtalmologique régulier, en particulier s’il est porteur du VIH.

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